la socialisation est surtout une affaire de terrain (mais pas que)
A force de parler de l’importance des réseaux sociaux, nous pourrions croire qu’avant Facebook, Twitter et autre Linkedin il n’y avait pas de vie sociale. Et ce n’est pas une affaire de génération : il suffit d’observer le nombre de personnes de 7 à 77 ans qui, dans les lieux publics, sont rivées sur leurs smartphones !
Comme nous le démontre Thibaud (ingénieur agro ISTOM, à Madagascar) le management et la relation sociale sont clairement une affaire de terrain. « Ce n’est pas parce qu’on participe au travail de la base, qu’on perd de son autorité, bien au contraire » affirme Thibaud. Certes, il exerce un métier de terrain au sens propre : son management ne se fait pas derrière un écran même si son reporting quotidien se fait via des tableaux Excel.
Thibaud exerce le métier de "responsable agro" qui consiste à superviser 1200 agriculteurs malgaches en s'appuyant sur des "sous officiers" que sont les chefs de secteurs et les chefs de zones. Il a en fait une triple responsabilité : agricole, management et développement (cf. recrutement de paysans et de nouveaux chefs de secteurs/chefs de zones) ; sans oublier l'objectif fondamental de quantité et qualité de la production.
Dans ces métiers – agriculture, bâtiment, voire industrie – on se renifle*, on se tape sur l’épaule, on s’engueule, mais on finit toujours par se serrer la main, c’est la loi du genre.
* « on se renifle » - Je suis persuadé (intuition) que les phéromones - ces parfums invisibles et inodores - nous mènent par le bout du nez dans nos relations aux autres. Je les soupçonne même de compter autant que la vue pour les coups de foudre :-)
Dans les métiers du conseil (consultants, cabinets d’ingénierie, community managers, etc.) on peut, que dis-je : on doit aussi être sur le terrain. Je ne suis pas le seul à constater que les entreprises ont perdu le sens du contact humain (1) et je peux vous confirmer – à l’exemple des 5 à 7 du conseil – que les actions terrain qui permettent de construire, développer et renforcer sa relation avec les autres sont primordiales.
Comme je l’explique dans mon article Community Manager, homme-orchestre du web 2.0, les pros du numérique auraient tort de se dispenser d’actions sociales terrain, ne serait-ce que pour s’imprégner du/des métier/s de l’entreprise, de l’institution, de l’association, de l’administration ou du syndicat pour lequel ils travaillent.
Gardons à l’esprit que l’homme est grégaire : depuis la nuit des temps nous avons une vie sociale. A ce sujet, je vous recommande vivement le livre Sapiens, une brève historie de l’humanité, où son auteur Yuval Noah Harari nous explique comment l’homme a structuré différentes formes de hiérarchies sociales, dont le modèle des castes indiennes est l’exemple le plus frappant (« le cercle vicieux », pages 168-170) et celui de la relation homme-femme ne manque pas de remettre les pendules à l’heure (« Sexe et genre » & « Force musculaire », pages 180-189).
La différence entre la socialisation avant et après Facebook, Linkedin, Google+ et autres Twitter est l’envergure géographique de notre socialisation, voire cette tendance ubiquitaire où la distance et la temporalité ont disparu avec l’ATAWAD (any time,
Mais ne nous y trompons pas : nos cercles sociaux que sont la famille, les cultes, les alumni, les associations loisirs et hobbies et les syndicats professionnels ont toujours un rôle capital, même si certains comme les syndicats et partis politiques voient leurs nombres d’adhérents diminués depuis plusieurs années, voire dizaines d’années. Situation que la zone de turbulences socio-politoco-syndicales actuelles ne favorisent pas (4).
Utiliser les réseaux et médias sociaux est indispensable pour donner de la visibilité à sa vie sociale terrain
Ceci étant dit, si la socialisation terrain est indispensable – voire est la qualité première de la socialisation – utiliser à des fins professionnelles les réseaux sociaux (Facebook, Google+, Linkedin, Twitter et autres) et les médias sociaux (Scoop.it, YouTube, etc.) est indispensable pour donner de la visibilité à sa vie sociale terrain.
Pour ce qui est notamment de l’ISTOM, cette école forme des ingénieurs aux métiers de l’agro-développement spécialisés pays équatoriaux (i.e. : l’ISTOM est né à l’époque des colonies). Il est évident que dans leur cas les réseaux sociaux sont un excellent moyen de maintenir le contact au sein de leur diaspora répartie sur les 24 segments de l’équateur et faciliter les opportunités professionnelles. Il est d’ailleurs étonnant de constater que l’ISTOM ne soit pas présent sur l’onglet Linkedin « anciens élèves ».
Au-delà du web, nous aurons toujours plaisir à aller sur les marchés, ces espaces sociaux qui sont un des charmes de notre douce France. Et ce n’est pas sans raison que les élus les arpentent en long, en large et en travers en période électorale.
15 juin 2016
Bravo Jean-Philippe pour cet excellent article sur le juste équilibre à trouver entre réseaux sociaux et vie sociale de terrain.
Ta réflexion conforte ma conviction que le management efficace et la qualité de la relation viennent tout d’abord de l’implication du manager sur le TERRAIN au contact de ce qui se passe dans la vraie vie, interne en proximité avec les équipes ou externe en proximité avec les clients et les autres parties prenantes de l’entreprise.
Ensuite, les réseaux sociaux viennent prendre le relais et ne font qu’AMPLIFIER en termes de VISIBILITE la réputation que le manager se sera préalablement construit sur le terrain.
Cette deuxième étape est néanmoins indispensable aujourd’hui et les deux socialisations sont donc complémentaires.
15 juin 2016
Merci Albert. Te connaissant, ta conviction est due à ton expérience terrain : pour toit le développement business ne se fait pas derrière un tableau Excel 😉
15 juin 2016
Tu me connais bien, Jean-Philippe, j’ai toujours privilégié le terrain au siège dans l’exercice de mes responsabilités, y compris celles de direction générale, nous sommes sur la même longueur d’onde !!
17 juin 2016
Excellent article ! On se renifle quand on travaille ensemble et quand ça ne marche pas, c’est parce qu’on ne peut pas se sentir !!
20 juin 2016
Cher Jean Philippe,
Super et très juste, Il est toujours bon de rappeler les fondamentaux! et évidemment je ne peux que rebondir sur ton client d’ œil aux odeurs, je confirme que le pouvoir des senteurs est absolument incontestable. Elles transmettent les valeurs des marques qui s’ en dotent et permettent de fidéliser de façon tout à fait inconsciente et subtile.
Bravo,
20 juin 2016
Merci Marie. Venant de Créassence, entreprise experte en « nez », le compliment me va droit au cœur.